Mai-1925

Cahier n°20

1er mai [1925]

Je crois que c'est un vrai succès. On vient voir. On semble très intéressé. Ça ne ressemble pas pourtant à tout ce qu'il y a autour. L'Exposition des A[rtistes] d[écorateurs] s'installe. Cela veut être une Ambassade. Ça sent plutôt le magasin. Pas de tenue. Retard énorme. Ma galerie est occupée par un spécialiste de Roux-Spitz qui fait du faux marbre et encore du faux marbre avec lequel Roux-Spitz élève des colonnes formidables et creuses qui donnent à des petites salles de collection des airs de tombeaux. Bien entendu rien n'est commencé pour le sol. Et toute cette histoire que ce gaillard m'a faite ! On m'annonce, sur mon couloir, en face mon entrée, des vitraux de Navarre.

9 [mai 1925]

Chez M. Royer je suis présenté à Mme Roux-Spitz. Comment une charmante personne comme elle peut-elle s'approcher d'un être aussi blafard ?

11 [mai 1925]

Richepin devait venir à ma salle. Il est malade. J'ai seulement vu arriver les yeux immenses de la belle Mme Jourde.

14 [mai 1925]

Vie sur-agitée. Dérangements innombrables, Salon qui finit, jury. Cette Exposition dont l'inauguration de ma partie est retardée par le retard des Artistes décorateurs. Moi, je suis prêt. Commencé le buste de la petite Anne Bokanowski.

Et puis mise au point avec Silva Costa du contrat pour le Christ du mont Corcovado.

19 [mai 1925]

Impossible d'avoir des précisions sur le numéro dans lequel paraîtra l'article de Hourticq sur mon Temple, dans la R[evue d']a[rt] a[ncien et] m[oderne]. On va faire à l'Exp[osition] des inaugurations partielles. La Cour des Métiers, la carcasse de l'Ambassade, ma salle, seront inaugurées le 23. Envoi d'invitations.

21 [mai 1925]

J'ai toutes les peines du monde à recevoir mes amis dans ma salle. Ces messieurs les A[rtistes] d[écorateurs] empêchent tout le monde d'entrer. Fait la connaissance d'un autre manitou de cette noble société, un nommé, Géo Lamothe, le trésorier. Il est fort poilu et très doucereux.

23 [mai 1925]

Inauguration. Succès certain. Beaucoup de monde qui s'attardait. On regarde avec soin. J'avais invité Thiébault-Sisson qui est resté longuement. Mais je n'ai pas encore eu la proposition [1] de me faire construire. Cette exposition me l'apportera-t-elle ?

25 [mai 1925]

Vie sur-agitée, idiote. Je suis attiré vers mon exposition. Je perds beaucoup de temps. Lettre de ce Jourde [2], cet architecte entrepreneur bordelais qui me demande de faire avec lui, le concours du Monument aux Morts de Bordeaux, en prenant les Fantômes comme point de départ.

27 [mai 1925]

On voit surgir chaque jour les plus invraisemblables fantaisies architecturales sur cette esplanade et autour du Grand Palais. Il y a une chose d'un bel arrangement[3], c'est la porte d'entrée de Brandt. Mais que dire du pavillon de l'Intransigeant ? S'élève aussi un pavillon des Soviets qui est la plus incompréhensible, in-pratique conception qui soit. Le Quotidien fera aussi son pavillon et on me demande de faire, pour [ce pavillon], une statue de la République. À enlever en dix jours.

Comme, lorsqu'il était venu me voir, M. Max Leclerc m'avait dit qu'il ferait son possible pour m'aider à réaliser ce Temple, je suis allé le voir pour lui demander de publier en brochure l'étude de Louis Hourticq. Il a trouvé mille raisons pour ne pas le faire : pas le genre de la maison, pas suffisant tirage, etc.

 


[1]    . Au lieu de : "demande", raturé.

[2]    . En définitive, Raoul Jourde n'exécutera jamais ce monument.

[3]    . La phrase débute par : "Mais", raturé.