Mai-1932

Cahier n°31

2 [mai 1932]

Nous avions passé une soirée assez mélancolique hier soir avec Madame Locquin que nous avions un peu recueillie pour attendre le résultat des élections. Son mari lui téléphone vers neuf heures, lui annonçant son ballottage, ball[ottage] d'ailleurs favorable. Marcel [a] filé chez son ami Dumanois pour avoir les nouvelles T. S. F., revient après assez longtemps nous annonçant[1] l'élection Tardieu, l'échec Paul Faure. Et quelques autres résultats qui nous semblaient favorables à T[ardieu]. Nous avions l'impression d'un échec [2], que la même situation se retrouverait, peut-être aggravée. Les nouvelles de ce matin sont heureusement tout autres. Il semble vraiment que le pays ait manifesté sa réprobation de la politique de droite, de corruption, de militarisme qu'il subit depuis plus de quatre ans. Pour moi, ma direction principale c'est le désarmement, la détente internationale. Puissions-nous prendre la tête d'un pareil mouvement. Si Herriot comprend, il pourra être le grand homme de notre époque.

Est-ce cette sorte de détente en moi, mais j'ai passé une bien bonne journée aux fontaines[3]. Le décor du couronnement. Et la Flore du pylône. Demain je continuerai et commencerai les départs du socle d'eau. Visite du docteur Goltrain, emballé du fronton Widal. Mais je suis tout aux fontaines. J'ai beaucoup de mal à les quitter pour travailler à autre chose, pourtant autre chose aussi est intéressant. Ces fontaines, je crois bien, compteront dans mon œuvre. Je n'aurais jamais cru que je me serais autant intéressé à une œuvre purement décorative. C'est le cas de dire : il ne faut pas dire, fontaine je ne boirai pas de ton eau!

4 [mai 1932]

Corrections chez Morenon et chez Lagriffoul. Au fond c'est absurde ce système de corriger les concurrents. Sauf en musique, il en est ainsi dans toutes les sections. Peut-être est-ce pour cela que l'on a tant de déceptions ensuite, lorsque les jeunes gens sont seuls, livrés à eux-mêmes. École. Julian où les jeunes filles copiaient un modèle admirable. Je vais la faire venir pour mes fontaines. J'aurai ainsi trois types féminins très différents. Le couronnement est terminé. Demain commencement du moulage. La semaine prochaine j'aurai mon ensemble à grande échelle. Terminé aussi aujourd'hui le motif le Blé, du moins autant qu'il peut l'être en cette cire blanche. Puis séance avec Mme Meunier. Elle arrivait de ses premières répétitions de la Tour de Nesles. Elle était encore toute énervée de la façon de jouer de son partenaire du 1er acte :

— Concevez-vous ça! Vous ne devinerez jamais. Un homme qui a au moins trente ans. Eh bien, il ne sait pas prendre une femme dans ses bras!

Elle est très emballée de son rôle, mais dit avec raison qu'il faut jouer une pièce comme celle-là sans réfléchir et sans laisser au public le temps de réfléchir. Parlant du théâtre en général, elle me disait que les théâtres subventionnés servent beaucoup au placement des petites amies des ministres. L'Odéon a ainsi dû, ces dernières années, recevoir quelques conquêtes de Petsche. Chappedelaine [a] aussi obligé Abram a recevoir sa maîtresse. Elle n'avait jamais joué. Comme Chappedelaine voulait obtenir pour elle un gros traitement, Abram lui répondit ceci :

— Mais vous, Monsieur le ministre, vous ne donnez pas à un mousse les appointements d'un amiral.

Chappedelaine n'insista pas. Régulièrement ne devraient entrer au Français ou à l'Odéon que les premiers prix. Il est loin d'en être ainsi. Marie Marquet n'est pas premier prix. Quand Gémier devint directeur de l'Odéon, comme elle était à ce moment la maîtresse de Gémier, elle voulut y entrer. Il y eut bataille dans les couloirs entre elle et Mégard, [la] femme de Gémier. Elle entra au Français un peu plus tard, alors qu'elle était maîtresse du fils de Millerand. Je ne m'indigne vraiment pas de tout cela. Il en était ainsi sous les anciens régimes. Il en serait de même sous le régime le plus bolchevique du monde. Il faudrait seulement que ces dames aient du talent et qu'elles soient vraiment belles.

Charles Meunier croit que dimanche marquera un recul sur le mouvement à gauche de dimanche dernier. Mais dans l'ensemble la Chambre nouvelle sera moins réactionnaire que la dernière[4]. Je viens d'écouter à la T. S. F., que le nouveau garçon que j'ai, a installée dans la cuisine, le discours[5] de Tardieu, que l'on pourrait appeler le discours S. O. S. Réédition de ce qu'il a déjà dit, et surtout nouvelle attaque à fond contre le socialisme. Cette Chambre et lui, son chef, avaient tout en mains, majorité fidèle, argent, journaux. Il pouvait faire ce qu'il voulait. Sa volonté en tout a été négative. Sans le prestige d'honnêteté de Poincaré, il a voulu continuer à être l'homme qui à tout, dit "non", pour finir par dire "oui" en rechignant. Il aurait pu acquérir une gloire, une puissance, un rayonnement sans pareil. Il n'y a qu'à voir le prestige de Briand, qui a pourtant bien peu réalisé, mais qui avait vu grand et généreusement. Penser généreusement[6]. L'amour du monde ira à l'homme qui pensera généreusement, agira généreusement. Mais lui, ce malheureux Tardieu, que l'on nous dit si intelligent, il a tout raté, l'accès danubien, la conférence du désarmement et ses élections. Que serait-ce s'il n'était pas intelligent?

5 [mai 1932]

Commencé le buste de J[ean] Vignaud. Belle tête robuste, complètement rasé et, c'est curieux, c'est le premier buste d'homme rasé, encore jeune, que j'exécute. La séance a été excellente, et c'était amusant de nous retrouver ainsi. Il a une position excellente au Petit Parisien. Je crois qu'il a cent cinquante mille francs par an. De plus le Petit Parisien assure à ses rédacteurs[7] des retraites importantes. Si il se retirait à présent, il aurait environ quarante mille francs. Dans une dizaine d'années ce sera beaucoup plus. Nous parlons de choses et d'autres et naturellement la conversation vint à tomber sur la situation politique et sur Tardieu. Naturellement aussi on parla de son passé et je demandai ce qui en était de cette histoire de N'goko-S[anga].

— Si je la connais! me dit-il en riant, mais c'est à moi qu'on est venu offrir cette affaire en premier. Le vieux Dupuis, mon patron, avait acheté dans les environs de Paris une grande propriété pour y offrir des chasses. Un jour il reçoit la visite d'un certain M. Métayer qui se présente à lui comme voisin de campagne. Il lui explique que ruiné, il ne lui reste plus que sa petite propriété voisine, qu'il vit là modestement, n'ayant pas grand chose à faire. Il se propose donc à M. Dupuis pour réorganiser sa chasse, la surveiller, amicalement.

— Mais que voulez-vous en échange? lui demande P. Dupuy.

— Rien du tout, repond l'autre, que vous ayez seulement l'amabilité de m'inviter à vos chasses et à vos réceptions.

Convenu. L'autre rapidement sait user des relations politiques qu'il noue ainsi. Ayant jadis trafiqué aux Colonies, c'est sur le ministre des Colonies qu'il porte ses efforts, obtient diverses concessions, refait sa fortune et c'est ainsi qu'il arrive un jour à Vignaud lui disant :

— Vous seriez bien gentil de me débrouiller une affaire compliquée que j'ai en Afrique.

C'était la concession de la N'goko-Sanga. Vignaud se récusa. À quelque temps de là, M. Métayer lui dit :

— Vous savez, j'ai trouvé mon homme pour la N'goko-Sanga. C'est Tardieu, que j'ai rencontré ici. Il a tout de suite accepté. Il engloutit des encriers. Ça s'arrange très bien. Il saura faire le nécessaire dans la presse.

Trouvé un arrangement nouveau pour le départ des eaux à la base des fontaines[8]. Travail réellement passionnant, extraordinairement passionnant. Ce n'est pourtant que de l'arrangement et de l'ingéniosité. Ce qui prouve que la recherche de l'expression des idées est ce qu'il y a de plus difficile en statuaire, quand on cherche, comme je l'ai toujours fait, à les penser plastiquement. Les arrangements purement décoratifs sont un jeu à côté. Jusqu'à cette commande, je ne m'y étais jamais profondément intéressé. C'était peut-être un tort. En tout cas cette décoration m'intéresse follement. Et je crois qu'elle apportera une note nouvelle.

Visite de Madame Fontaine et de sa fille. Toutes deux sont contentes du buste que j'ai pu terminer entre mes séances. Il est bien. La pauvre Madame Fontaine m'a quitté en larmes.

6 [mai 1932]

J'aurai passé encore aujourd'hui une merveilleuse journée. Matin à la base des fontaines. Après-midi au nu de la figure de dos du motif de la Seine, lorsque Lily-Ladis me téléphone pour m'apprendre l'assassinat de Doumer. On rapporte tout en ce moment aux élections et tout de suite la pensée m'est venue que cela pourrait produire un revirement d'opinion. Cet acte stupide a été commis par un réfugié russe. Dans ce malheur c'est une consolation. Il était très sympathique Doumer. Mais ce soir, nous avons été avec Zina Lafont à la réunion de Lagorgette (organisée pour conjurer les communistes de faire bloc sur son nom) et on pouvait se rendre compte que l'assassinat de Doumer était bien la dernière préoccupation de ces milliers de gens. Ils étaient probablement de 2 500 à 3 000. Atmosphère ardente, manifestant violemment mais écoutant les orateurs. Il y avait Paul Faure, le vaincu du Creusot. Il a été fort bon. Je suis frappé combien tous ces hommes parlent bien et savent parler. Est-ce difficile? Je crois que l'on doit y arriver. Paul Faure nous a parlé d'abord de sa prétendue richesse. Il est tellement riche qu'il est obligé de mettre en vente la petite maison qui lui venait de ses parents. On a dit aussi qu'il était propriétaire d'un château aux environs de Périgueux. Il y a en effet, aux environs de Périgueux, un certain M. Faure propriétaire d'un magnifique château. Mais c'est un autre Faure. Après quelques plaisanteries à ce sujet, la question Schneider. La pression. Les menaces de renvoi de plusieurs milliers d'ouvriers, du transfert des usines en Lorraine et de l'abandon de la ville du Creusot. Puis la révélation suivante à propos du vote par la dernière Chambre du fameux cuirassé de 26 000 tonnes, un matin, en sourdine, alors qu'il n'y avait presque personne, coût 800 000 000. Voici. Après que le Breslau eût été coulé en Méditerranée, le Goeben qui était parvenu à s'échapper avait gagné l'Est méditerranéen et s'était abrité à Constantinople. De là il accomplit quelques raids puis attendit la fin de la guerre. Les experts au moment des traités, le déclarèrent hors d'usage, inutilisable et l'abandonnèrent à la Turquie. Or voici qu'on apprit soudain que le Goeben transformé était devenu sous le nom de Sultan Afid (je crois), un croiseur de 16 000 tonnes, d'une vitesse et d'un armement supérieurs à nos meilleurs vaisseaux de la Méditerranée. Gros émoi parmi nos experts maritimes. Immédiatement campagne. Et le ministère de la Marine propose aux Chambres la mise en chantier d'un vaisseau capable de lutter contre le Sultan Afid qui devrait être de 23 000 tonnes et coûter 600 000 000. À la commission on s'étonne, on proteste contre une pareille dépense et sur la demande même d'un naïf de la droite, on renvoie le projet aux experts de la marine, leur demandant d'étudier un vaisseau de quelques milliers de tonnes en moins pour essayer d'économiser 100 ou 200 000 000. On rassure la Chambre. On promet d'étudier. On la met en rapport dans ce but avec les ingénieurs des chantiers de S[ain]t-Nazaire qui doivent exécuter le bateau (filiale des usines du Creusot). Et un beau matin, en sourdine, le projet révisé revient, mais au lieu d'être diminué, il est augmenté. Le Sultan Afid est tellement dangereux, tellement habilement reconstruit qu'il est impossible de lui opposer un vaisseau de moins de 26 000 tonnes, coût cette fois-ci 800 000 000. Et cette Chambre vote. Après quoi l'on apprend, trop tard malheureusement, que ce sont les mêmes chantiers de S[ain]t-Nazaire (Le Creusot) qui ont rafistolé, équipé, muni de tous les derniers raffinements le Sultan Afid. Le tour est joué. C'est toujours le même. Ça réussit chaque fois. Un brigand, au coin d'un bois, vous assaille, vous demande la bourse ou la vie. Ces gens-là vous prennent la bourse et la vie.

Après Paul Faure, Lagorgette, le candidat parla. Après lui, Coste, le communiste, pour prouver qu'il avait autant de chances de triompher si Lagorgette se désistait pour lui! Évidemment. [..] d'ailleurs à tous points de vue, Lagorgette, en premier lieu, le distançant au premier tour de près de 1 500 voix. Gens butés, esprits fermés. Je me trouvais dans un groupe où étaient quelques communistes. La consigne et la doctrine avant toute autre considération. Nous sommes partis avant la fin. Aspect de la salle magnifique. Tout dans une buée grise. La tenue devait assez ressembler à ce que sont les salles de spectacle en Russie. Quelle force latente on sent dans cette foule grise. Prête à s'enflammer à la moindre pensée généreuse qui lui est donnée. Nous pensions en sortant : Comme la mort de Doumer est indifférente à tout ce monde! Qui y pensera dans huit jours. Une malheureuse vieille femme seule.

7 [mai 1932]

À l'académie Julian un modèle ravissant, long torse, que j'ai retenue pour mes fontaines[9]. Avec Kathia et la petite C[ombet], j'ai trois natures très différentes et fort belles toutes les trois. L'exécution en grand sera un grand plaisir aussi. Chez Lagriffoul, je trouve son esquisse très améliorée. Il peut réussir. Puis l'exposition de ce jeune sculpteur Muguet, si remuant, élève de Bourdelle, candidat à la Fondation américaine. Je n'aime guère tout cela. C'est systématique, il fait partie de ces jeunes gens qui commencent par la fin. Ils vous parlent synthèse sans avoir rien analysé. Alors, ils synthétisent quoi?

Déjeuner chez Madame Bour. C'est là que se réunit désormais notre déjeuner "super Institut". Convives : M. Mazon, Valéry, Hourticq, P[aul] Léon, Perrin, Pontremoli, Pelliot, Lévy-Bruhl. J'avais rencontré P[aul] Léon sur l'avenue, en arrivant. Il avait passé une partie de sa nuit à Beaujon, au ministère, à l'Élysée, pour s'occuper des obsèques. Il était éreinté. Tout le monde était assez retourné[10] par cet événement. Pelliot revient de Russie, de Petrograd. Le déjeuner donc consista surtout en une conférence de Pelliot sur la Russie. Il y avait été en mission scientifique pour voir les restes d'une tombe de quelque chef d'une bande nomade. Tombe datant d'environ trois siècles avant notre ère. On avait inhumé[11] l'homme avec ses biens et sacrifié dix chevaux. Le tumulus fut sans doute profané très peu de temps après les funérailles par des pillards qui en percèrent la voûte[12], s'emparèrent du métal précieux. Par l'ouverture pénétrèrent les pluies et la neige. Le tout gela, si bien que chef, chevaux et ce qui restait fut conservé au point que les chevaux purent être naturalisés.

Mais ce n'est pas de cela surtout que nous entretint Pelliot, mais de la vie en Russie. Son impression principale est l'extraordinaire orgueil des Bolcheviques. C'est un patriotisme de doctrine qui remplace le patriotisme national. Il y a là-bas une science soviétique, une histoire soviétique, presque une mathématique soviétique, etc., tout cela ne devant rien aux branches bourgeoises correspondantes. Presque tous les gens qui avaient voyagé, vu, connu l'Europe sont disparus. Vit là-bas une génération nouvelle qui n'a aucune idée d'une autre civilisation ou qui n'en ont que les aperçus qu'on leur en donne[13] dans les traités soviétiques. On vit mal, mais on vit. La misère des campagnes a fait refluer les paysans dans les villes où ils trouvent à s'employer dans les usines. Les habitations sont surpeuplées. On a droit à 7 m² de logement, c'est-à-dire 3 m 50 x 2 m 50! Mais la confiance règne pour l'avenir. On est sous-payé, sous-alimenté, pas chauffé, mais on exporte bois, blé, etc. Et le plan quinquennal, dit-on, réussit. En ce moment, on balade une mission turque, prélude à une union complète entre la Russie et la Turquie et même à une soviétisation de la Turquie. Mustapha Kemal serait supprimé...

J'ai remis à Hourticq le livre d'Isay. Il l'a feuilleté tandis qu'il m'attendait pendant que j'allais prendre des nouvelles du bon docteur Armaingaud, qui va de mieux en mieux. Hourticq m'a dit :

— C'est l'œuvre d'un homme qui aurait travaillé pendant cent ans.

8 [mai 1932]

Scrutin de ballottage. Téléphoné à Auriol. Il est plein de confiance d'une manière générale :

— Nous serons 125.

Je lui demande s'ils participeront.

— Ce serait mon avis. Mais il y a une question de programme minimum.

Il m'annonce la mort subite d'Albert Thomas.

Au cinéma avec Lily et Françoise[14] pour ce film dont on dit avec raison grand bien : Les jeunes filles en uniforme. C'est très bien, en effet. Que de civilisations dans notre civilisation. Que de sociétés dans notre Société. C'est un film qui réellement fait réfléchir. Il vous poursuit.

Marcel et Jean[-Max][15] rentrent tard. Ils ont été attendre le résultat des élections de Boulogne. À quelques voix, une soixantaine, Fernand Laurent est élu. Il paraît que ce résultat fut accueilli par des huées. Morizet aurait dit qu'il avait les preuves de plusieurs cas de corruption et que F[ernand] L[aurent] serait invalidé.

Nous nous couchons tard. Il semble que le résultat des élections soit triomphal pour les radicaux socialistes et les socialistes. Malheureusement un échec qui nous cause beaucoup de chagrin, celui de Locquin. Les renseignements qu'a reçus sa fille, incomplets encore, sont pourtant mauvais. D'autres succès nous agacent, celui de Mandel, celui de de Wendel.

9 [mai 1932]

Les élections renversent le ministère Tardieu. C'est une sorte de révolution. En réalité, le pays a voté pour la politique de Briand.

Bréguet venu poser. Il revient de Tunisie. Il me raconte qu'il a vu à Tunis M. Manceron, le résident. Celui-ci lui a dit avoir reçu de Tardieu l'ordre de refuser toute permission de retourner en Corse pour voter, à un certain nombre de fonctionnaires corses placés là par Landry. Il s'agissait en effet de favoriser Carbuccia. Par contre Chiappe a envoyé en permission nombre d'agents, voyages payés (coût 1 000 F). Ces réussites partielles n'empêchent pas que ce parti est balayé.

Matinée un peu fatigué. Après-midi bonne. Cette semaine ce pylône[16] sera fini. Pour les départs d'eau de la base, je supprime les masques cracheurs. En fait c'est banal. Ça s'arrangeait mal. Ce vague relent Louis XIV ne va pas avec le style de l'ensemble. Ces ouvertures architecturées ornées de fleurs de lotus, c'est plus simple, ça compte moins, et c'est bien mieux. Mais tout ça va être encore un rude travail à exécuter en grand.

Notre petit Marcel revient du concours général en composition française. Très emballé de son sujet sur le théâtre en vers et en prose.

10 [mai 1932]

Fatigué. Mais bonne journée. L'homme du couple du motif des vendanges. La Cérès. Demain Colin apportera le couronnement moulé.

Isay à qui je téléphone me dit que Verne lui a dit, après avoir lu son étude :

— Je croyais bien connaître Landowski, comme un artiste imaginatif, mais je ne me rendais pas compte de la place qu'il occupe dans le mouvement contemporain dont il est un chaînon important.

Il lui a dit d'autres choses du même ordre, des plus flatteuses, et qui font plaisir, grand plaisir.

On nous a élu Lebrun comme président de la République. Il ne pouvait pas en être autrement aujourd'hui. Ce ne sera jamais qu'un succédané de Poincaré. Je l'ai entendu, il y a quinze jours, nous faire une petite improvisation au banquet du vernissage. C'était bien médiocre.

Lily rentre de Paris en racontant une amusante histoire. On a fait courir le bruit que Chiappe s'était suicidé. Dans les magasins, dans la rue, cela se répétait, s'infiltrait, et personne ne s'en attristait. La préfecture fit démentir. Amusant. Élégante façon de faire comprendre à quelqu'un qu'il ferait bien de s'en aller.

Fatigue disparue. Chez Lagriffoul qui a amélioré considérablement son esquisse. Celle de Reichenstein a gagné aussi. Je crois que j'arrive à les diriger tous dans leur sens, et à leur faire tirer le meilleur parti de leurs embryons d'idées. Quand je me rappelle ma façon de conduire mon concours, j'étais tout le contraire de ces jeunes gens. Je n'avais rien voulu montrer à mon brave patron, au lieu d'être à attendre de lui le développement et même les idées essentielles.

Avant d'aller chez M. Blumenthal avec qui j'avais rendez-vous, passé en vitesse aux Artistes décorateurs, pour voir le phare de cet architecte Favier, projet pour le rond-point de la Défense. Je ne serais pas très emballé de voir là la Victoire du projet Bigot, mais c'est mille fois mieux que cette affaire compliquée, immense, et qui ne répond à rien. Ce phare a été l'occasion pour le groupe des sculpteurs des Tuileries de faire une manifestation tout à la fois de leur prétention et de leur faiblesse. Croient-ils vraiment[17] s'imposer par d'aussi piètres exhibitions. Ils sont là une douzaine, je note Despiau, Drivier, Dejean, Jeanniot, Gimond, Guenot, Comtesse, Wlérick. Je ne me souviens plus des quelques autres. Tout ça se ressemble de manière curieuse. Il y a la fameuse Ève de Despiau, du Luxembourg, si laide, et dont l'exécution par la machine accentue[18] la faiblesse et le vide. De Drivier un Nu également grandi à la machine. C'est vraiment incroyable d'aimer aussi peu son affaire. Ce n'est même pas retouché. Je comprends qu'on se serve de ce procédé, mais que ce ne soit qu'une étape! Exposer cela, aussi prétentieusement, comme le résultat d'un effort sérieux et sincère, quelle duperie. Car ces messieurs se sont groupés, seuls précieusement dans cette petite salle isolée comme un coupe-gorge. Je crois que la mentalité de cette bande est bien celle d'un semblable lieu. Il paraît que les petits camarades de la Société sont assez furieux d'avoir été maintenus à l'écart. Boutiques. Boutiques. Comme on est heureux de n'y pas être trop mêlé.

J'ai été porter le livre d'Isay à George Blumenthal. Il est bien. Il a été content des élections. Il espère qu'elles apporteront une détente. Tardieu n'avait aucune popularité à l'étranger. Été serrer la main à Mme Barbier. Il paraît que Riou est toujours en assez mauvais état à Lablachère [?]. Au moment où je m'en allais L[ouis] Artus est arrivé. Quel homme exquis et sympathique.

Heureuse après-midi. Installation[19] du couronnement moulé à l'échelle de 15 %. Impression vraiment bonne. Je crois vraiment avoir trouvé là quelque chose de bien, de nouveau. Émile Pinchon venu, a été très satisfait. Lui ai montré le livre d'Isay.

Séance de Mme Meunier, accompagnée de Charles. Elle était bien fatiguée, enrouée. Elle arrivait encore de la Tour de Nesles, mais contente. On lui a changé son partenaire du premier acte. Charles dit que Lebrun sera très bien. Il croit à un ministère de concentration, sans les socialistes et sans le groupe Marin. Si les socialistes maintiennent leur résolution de ne pas participer, il ne faut cependant pas gouverner contre eux. Ce serait une sottise.

Mon buste ne va pas très bien. Excessivement difficile. Elle est belle. Mais à la fois un peu empâtée et un peu marquée par la vie et par l'âge. Quoique jeune encore. Très expressive. Un de ces bustes très difficiles, complexes.

12 [mai 1932]

Attendu  Bréguet. Ai travaillé aux départs du socle d'eau, frises de poissons[20]. Visite de Pommier. Tout à fait content du couronnement. Il n'y a plus qu'à arranger le premier bassin. Moulures trop grosses, sans esprit. Banalité. Mais je crois avoir trouvé. Nous verrons demain. Visite de M. Riou et de Séassal. Homme intelligent. Par crainte de déprédations, M. Riou préfère que la porte ne soit plus décorée extérieurement. Séassal l'y pousse. C'est un peu dommage. Cela s'arrangeait bien. Mais cela s'arrangera bien aussi à l'intérieur. Six bas-reliefs, au centre de chaque panneau. Les deux autres plans de l'octogone sont occupés par l'autel et la porte d'entrée. Le bien aurait été de faire les deux. Décorer l'entrée et l'intérieur. Il n'y a aucun éclairage à l'intérieur, pas une baie, rien. Mais comme à l'avenir des cérémonies culturelles y auront lieu, on va organiser un éclairage. L'avantage de cette solution est que je pourrai faire le travail ici. Mais je crois qu'au fond Séassal a quelque arrière-pensée en orientant son client vers cette solution. Probablement pour faire faire l'encadrement par un de ses amis Jeanniot?

13 [mai 1932]

Billard confirme la bonne impression d'hier de Pommier. Il approuve mes intentions de modifier le tour de la vasque [21] principale. Là, il ne faut que l'eau qui compte. mais toujours par suintement. Il faut amener là des perpendiculaires. J'ai trouvé ce qu'il faut. Je fais supprimer aussi toutes ces petites boules des trois petits bassins en emmarchements. Quant à la sculpture, ça va, ça va. Enthousiasme. Je ne pense qu'à ces fontaines. Le pylône de la Seine est terminé. Je le parachève en regardant du coin de l'œil celui de Paris. Les améliorations viennent. Je me demande cependant si avant je ne terminerai pas la maquette Foch. Il serait temps. En attendant, aujourd'hui, le groupe de la  vendangeuse et du vendangeur, et l'après-midi la petite source agenouillée à la droite de la Seine.

À propos de mon enseignement, de ma méthode, je lisais aujourd'hui que pour l'enseignement du dessin, Delacroix recommandait le procédé ancien de la vitre ou de la page tendue qui permettait à l'élève de calquer en quelque sorte le modèle. Holbein et les artistes de son époque se servaient beaucoup de la vitre. Pour arriver à se faire un œil juste. Il faut réserver sa fougue romantique pour la fin. Au début une implacable méthode.

14 [mai 1932]

Il y a des jours où l'on se sent plein d'entrain et de confiance. On est comme un jeune homme. On pense à l'avenir sans songer au passé déjà long que l'on a derrière soi. Il y a d'autres jours où l'on est sans élan. Il semble que l'on n'a rien fait jusqu'à ce jour. Ce qu'on a à faire vous paraît sans intérêt, parce qu'on se considère comme vieux. Je suis dans une de ces journées. Et pourtant le travail de l'atelier marche bien.

17 [mai 1932]

Retour de Chézy, Château-Thierry, Chalmont. Mariage de Georgette. Fête très réussie. Émouvante parce qu'il est resté là beaucoup du meilleur de ma jeunesse[22]. J'ai eu un moment de grande émotion à l'église, dans cette belle vieille église où nous sommes venus si souvent manœuvrer le levier de l'orgue lorsque nos amis organisaient des concerts[23] pour la réfection du vieux clocher. Mais ce n'est pas tant de m'être retrouvé dans cette église qui m'a ému. C'est tout à coup[24], de la tribune de l'orgue un chant de violon qui semblait venir du fond des années. Je ne l'avais pas reconnu tout de suite. Mais sans que j'y aie d'abord prêté attention je me suis retrouvé loin, très loin en arrière, non seulement à Chézy, mais à Paris, rue Blanche. C'était la Rêverie d'Henri Vieuxtemps dont le chant si beau vraiment, si large, si poignant, emplissait la nef et remuait chez nous tous, chez Benjamin, chez Joseph qui étaient derrière moi, les mêmes souvenirs. Chaque mesure, presque chaque note que j'entendais faisait surgir du passé des images immobilisées depuis si longtemps. Tout cela si présent. L'oncle Paul et Wanda. Présents comme si je les avais quittés hier. Et les deux appartements et le long escalier si fatigant à remonter les jeudis et les dimanches quand nous revenions d'avoir couru aux Tuileries. Tout cela pêle-mêle, comme un grand vent qui tout à coup découvre, soulève, anime[25] tout ce qui semblait mort sous les feuilles jaunies[26]. Pourquoi ces souvenirs plutôt que d'autres. En fin de compte on ne sait plus, car les uns s'enchaînent aux autres. Est-ce vraiment seulement dans notre mémoire que tant de choses, tant d'années demeurent comme aux aguets de l'événement qui les fera surgir?

En nous rendant à Chézy, j'ai fait voir aux enfants le jardin de Bossuet, vraiment qui vaut la peine d'être vu. Très évocateur. Après avoir retenu nos chambres à l'hôtel du Bonhomme à Château[-Thierry], expédition à Chalmont[27]. L'impression est bien meilleure depuis qu'on a enlevé la cabane du treuil. Évidemment ce serait mieux si le groupe était une demi fois plus grand. Il lui manque en réalité cinq mètres dans les deux sens, puisqu'il est aussi haut que large. Mais aussi bien les enfants que Ladis et Grimpret et Benjamin et Jo[seph] qui y sont allés le lendemain m'ont paru fort impressionnés. Moi, évidemment, je ne me rends plus très compte. La silhouette de la France est installée et fait, comme taille, bonne impression. Aussi dès ce matin, je me suis mis au grand modèle[28]. Bon travail. Je refais complètement la tête en terre. Le plâtre est d'un travail trop lent, pas assez direct. Après-midi, naturellement, aux fontaines. Les Sources. La figure agenouillée à la droite et au-dessous de la Seine. Tout bien. Je crois bien que je vais maintenant laisser ce motif-là. Tout est trouvé, étudié, plus rien à changer. Il n'y a qu'à finir, et à passer au suivant. Il se compose peu à peu dans ma tête. Il ira bien plus vite que celui-là. Mes quatre thèmes principaux seront : A. — Motif principal[29] : la Ville de Paris. Dressée à la poupe de la barque, des figures de nymphes émergeront de l'eau à ses pieds, un batelier, en costume du haut Moyen Âge arrêtant l'esquif, etc. B. — Le Théâtre. Présentée comme le Bacchus du motif des Vignes (pylône la Seine) une jeune femme nue jusqu'à la ceinture brandira dans ses mains des marionnettes : la Comédie et la Tragédie. Un couple de danseurs. Dans le fond une apparition de la Mort voilée (comme dans les danses macabres[30]). Tout cela comme sur un tréteau de parade de foire. Au pied des musiciens. C. — Les jardins. Un peu le même parti de composition : une jeune fille, avec un grand chapeau de paille, tenant un panier plein de fleurs, dans des treilles de rosiers; une jeune maman allaitant son bébé; le jardinier arrosant ses fleurs, etc. D. — Le Chantier : À peu près la seule composition qui restera de la première maquette. Chevaux, charretiers, grues, poulies, etc. encadrés à droite et à gauche par l'architecte et le sculpteur. Manquera le peintre à la fête. C'est si peu sculptural un peintre.

Fin de journée, comité Rome-Athènes que j'ai présidé en l'absence de Madeline, chez André Block. Amorcé l'importante question de l'exposition des envois de Rome à Paris.

18 [mai 1932]

Chez Landucci où avancent les bas-reliefs Widal. Mais surtout tête de la France Chalmont[31]. Matinée excellente. J'en ai un peu grossi le volume. Et surtout dans cette dimension plus grande que nature j'obtiens une expression bien plus forte et c'est de la sculpture. Ce sera une grande joie de voir cela en granit, au double.

Après-midi perdue. Jury à l'École des beaux-arts. Assemblée générale de la Fondation américaine. Réunion brillante, comme toujours. Émouvante par la pensée de la pauvre Florence Blumenthal. George Blumenthal a prononcé quelques mots bien touchants. Sa tête avait un caractère et une expression[32] que je n'oublierai pas (l'importance des orbites).

19 [mai 1932]

Couple des "Moustrouilleurs". La tête de la France Chalmont.

20 [mai 1932]

Deuxième séance Jean Vignaud. Je le trouve de plus en plus gentil, et bon, et intéressant. Tête excessivement intéressante. L'importance des yeux qui pourtant sont petits. Il a le front bas, la mâchoire forte et pourtant c'est un visage intelligent. Il me dit que l'on va vers un ministère de concentration. Bien entendu. Lebrun, homme aussi du comité des Forges, va pousser à l'étouffement de la victoire électorale républicaine et pacifique. La concentration ne pourra se faire qu'à droite. Donc on court à la catastrophe. Ah! qui nous débarrassera des hommes intelligents (!) pour les remplacer par des hommes de cœur. Il me raconte l'histoire typique suivante : Lorsque démissionna le dernier ministère Clemenceau, ses ministres se réunirent et décidèrent de lui offrir son automobile jusqu'à la fin de ses jours. Lorsque réunis, ils lui firent part de cette généreuse proposition :

— Je vous remercie, Messieurs, mais c'est inutile. Zaharoff y a déjà pensé.

Vignaud tient la chose d'un des ministres mêmes qui firent la proposition et reçurent la réponse.

Soirée passionnante à l'Odéon. La Tour de Nesles. Évidemment il y a des choses ridicules. Mais il y a là quelque chose qui emporte tout : la conviction. Il y a quelque chose d'autre : de la vie, du mouvement. C'est du théâtre. De plus très bien donné. Jeanne Briey est excellente. J'ai eu l'impression qu'à la fin, après la fameuse exclamation de Buridan : "Marguerite, je te reconnais bien là!" elle allait éclater de rire en déclarant à son jeune amant mourant : "Je suis ta mère." On rit en effet aujourd'hui devant ces situations excessives que la jeunesse d'alors prenait au sérieux, considérait comme l'art nouveau. Que restera-t-il dans cent ans du théâtre d'aujourd'hui? N'apparaîtra-t-il pas comme dix fois plus conventionnel que celui-là? Comme d'ailleurs presque tout l'art d'aujourd'hui.

21 [mai 1932]

Chez le sénateur Bérenger qui revient de Florence et m'en a donné la nostalgie en m'en parlant.

Manqué l'Institut pour travailler. La tête de La France, grandeur d'exécution. Je suis beaucoup plus à mon affaire sur une grande chose. On est sûr de ce qu'on fait.

Réception chez Madame Blondat, qui se remarie. Elle était ravissante, et son futur mari paraît fort sympathique. Parlé un moment avec L[ouis] Barthou qui viendra bientôt à l'atelier. Autre réception chez le général Dubail. Enfin dîner de l'École des beaux-arts où L[ouis] Hourticq qui présidait a prononcé un charmant discours. J'envie ceux qui parlent sans lire.

Je veux noter l'excellente exposition de Jacques[-Émile] Blanche chez Charpentier. Plusieurs toiles mieux que bien : remarquables.

22 [mai 1932]

Journée excellente. Travaillé dans le plus parfait silence au bouclier de La France de Chalmont[33]. Après-midi à la tête. Puis chez R[aoul] Laparra où nous entendons quelques très jolies mélodies de lui. Madame Mauclair a chanté excellemment. Mauclair me dit qu'il fera un article mardi sur le livre d'Isay.

Chez la tante Thomson[34]. Femme courageuse, remarquable.

23 [mai 1932]

Enterrement de Gaston Thomson. Discours de Painlevé, de Sarrault, de Germain-Martin. Même note de prudence. Si ceux dont ils ont parlé, qui ont fondé et consolidé la République, avaient été gens aussi prudents, la pauvre République n'existerait plus depuis longtemps. Ils ont peur de leur victoire aux élections. Ils auraient bien voulu être dans l'impossibilité d'appliquer le programme qui les a fait élire. Maintenant les voilà au pied du mur.

Encore quelques jours et j'aurai fini le pylône de la Seine. Il est bien. Celui de Paris sera plus amusant, plus fantaisiste.

Isay avec qui j'avais rendez-vous me dit avoir vu ce matin Miraux, le directeur du Temps ainsi que le directeur de l'agence Havas. Tous deux sont terriblement pessimistes. On craint très sérieusement un acte de guerre de la part des Hitlériens sur le couloir de Dantzig. Ce sera la conséquence de la veulerie des États qui ont laissé faire le coup de Fiume et le coup de Shangaï. Ces attentats auraient pu être arrêtés pacifiquement par une action commune des États de la Société des Nations. Toute faute porte un jour ou l'autre sa sanction. Parlant de choses et d'autres, il me dit que Lautier a faire chanter Hennessy, annonçant sa candidature en Charente. Hennessy paya. Lautier ne se présenta pas. Mais Hennessy fut battu par un autre candidat.

24 [mai 1932]

Buste Vignaud qui vient vite et bien. Le bouclier de La France Chalmont et la tête. J'ai emmené Lily voir. Très bonne impression.

J'ai commandé le mouleur pour vendredi pour le pylône de la Seine[35].

Il faudra que je lise ces papiers de Stresemann qui agitent tant nos nationalistes. Mais si ce que je lisais à leur sujet ce soir dans le Temps est vrai, c'est évidemment bien troublant. Si c'est vrai...

25 [mai 1932]

Après l'École et Julian, à la Librairie de France où avec Isay nous avons commencé le service de presse. Deux heures ont été englouties. Après chez Bigot qui avait oublié le rendez-vous. Aperçu sur sa table un plan de la porte Maillot qui m'a paru très bien.

Après-midi, groupe des amoureux avec ce grand garçon roumain qui travaille pour être acteur, et sa femme qui est pianiste. Ils sont gentils, très convenables, intelligents. Misère des temps. Après, le bouclier de La France Chalmont. C'est heureux que je n'aie pas eu cette idée au moment où je faisais celui du XVIe. J'aurais certainement employé ce motif pour mon centre. Je ne sais pas trop comment j'aurais arrangé celui-ci. Visite de l'ami Bigot. Le couronnement des fontaines a obtenu ses suffrages, comme la base des bassins dont il a trouvé l'ornement heureux. J'étais déjà assez rassuré. Je le suis tout à fait.

Première réunion du jury de la Fondation américaine. Nous n'avons pas fini. Il faudra une seconde réunion. Le résultat ne sera certainement pas intéressant. Ce sera encore certainement quelques petits suiveurs de Boucher, Despiau, etc., qui auront les deux bourses.

Dîner de la Tribune internationale. C'est un groupement de jeunes gens poursuivant ce but d'union, qui semble si difficile à atteindre. Luchaire en quittant la présidence, la laissait à Jacques. M. Le Trocquer [36], le sénateur, ancien ministre, présidait le dîner. Il y avait Ossouski, avec qui j'ai bavardé un moment et qui me disait la triste impression que donne Genève où tout le monde est découragé, sans ressort. Comment en peut-il être autrement quand ces gens de Genève sont sans pouvoir vrai, obligés d'obéir à leurs gouvernements, et que les gouvernements sont tous aussi stupides. Vers la fin du dîner est arrivé Philippe Clerc, le nouveau député de la Savoie. Il s'est assis à côté de moi. J'ai pu parler un peu avec lui. Il m'a dit entre autres que Herriot, depuis son entretien avec Tardieu et Flandin était atterré, qu'il ne se doutait pas que la situation était à ce point-là. À quel point? Eh bien effondrement économique qui va gagner tous les États, d'où naîtront des mouvements révolutionnaires. En fait, c'est l'effondrement d'un système social. Il y avait à ce dîner cette femme qui a voyagé en Orient, Titayna, avec qui Lily a causé un moment. J'aurais aussi voulu parler avec elle. Elle disait, paraît-il, à Lily qu'en Europe on ne comprend rien à l'histoire japonaise, parce qu'on ne se rend pas compte que c'est le contraire d'ici. C'est le peuple là-bas qui est nationaliste, pousse à la guerre. Les classes cultivées le sont beaucoup moins, sentent le péril. Quant à la Chine, qui en a pour des années et des années de chaos, de luttes intestines avant de se stabiliser, elle est très hostile au communisme. De l'avis de cette dame Titayna, le Japon serait beaucoup plus susceptible de devenir communiste que la Chine.

25 [mai 1932]

Ce matin, tandis que nous déjeunions en bas, avec Marcel, Hélène Alphandéry nous téléphone pour nous dire la mort subite de son père. C'était la fin qui le menaçait. Je ne le connaissais pas depuis longtemps, mais je l'aimais comme si je le connaissais depuis très longtemps. La mort d'un ami comme celui-là, d'un homme comme celui-là, c'est quelque chose de moins dans ma vie. Sa fin a été bien triste, sinon pour lui, pour les siens. Il est tombé dans l'autobus, à S[ain]t-Germain-des-Prés. On l'a descendu et porté à la Pitié. Ce n'est qu'à 9 heures du soir qu'on est venu prévenir rue de la Faisanderie. Hélène a eu toutes les peines du monde à faire rapporter son corps. Je l'ai vu tout à l'heure. Cette mort sans souffrance laisse à ce visage toute sa bienveillante expression. Il n'y manquait que ce regard noir si expressif, si intelligent et si bon.

Après dîner au Louvre, dans cette sinistre salle des conférences de l'École du Louvre, pour entendre la conférence de Mme Locquin sur la sculpture indienne. C'était très nourri, travail sérieux, mais pas assez direct. Conférence lue, avec interruptions pour projections. Curieux comme une conférence lue manque de vie. Mais les projections m'ont enchanté. Je connaissais par les photos presque tout ce qu'on nous a montré. Mais quelle vie cela prenait par le relief. Notre aimable conférencière n'a pas su cependant traduire l'émotion que donnent ces pierres, évoquer, ce qui était indispensable, l'intime union de la pensée indienne et de l'art indien. Par exemple, on nous a montré les temples monolithes (Ellora) : le travail gigantesque, invraisemblable, une montagne de granit rencontrée par un peuple en fuite, ce peuple attaquant ce granit, s'y installant d'abord pour y vivre et peu à peu le sculptait, entrait de plus en plus dans cette montagne, y superposait les salles, les galeries, en somme toute la vie sociale semble avoir été de sculpter la montagne, et pendant trois, quatre générations, jusqu'à ce que la montagne fût traversée, et ce peuple éphémère s'en allait, laissant derrière lui un peuple éternel de pierre. Plusieurs siècles de sculpture étaient abandonnés. Cela ne nous a pas été raconté tout à l'heure. Et c'est dommage. C'eût été plus émouvant que ces énumérations assez froides. Il aurait fallu aussi expliquer la raison de certaines formes, les influences passagères (persane, grecque, égyptienne), la transformation des pyramides en ces temples de richesse inouïe (Tanjore, Bhubaneswar), etc. Échangé avec M. Locquin quelques propos sur la politique. Il paraît qu'Herriot est atterré de la situation, après ses entrevues avec Tardieu. Au point qu'il aimerait fort ne pas prendre le pouvoir.

27 [mai 1932]

Détail du bouclier de La France Chalmont[37], modèle demi-grandeur. C'est encore trop petit pour préciser. Je me demande si ce que je fais sera exécutable en granit. En ce moment, ça fait bien, le bouclier seul.

Visite de Pierre Sicard qui m'apporte ses deux toiles d'Espagne. Après-midi perdue à l'École pour le congrès, invention d'Aubert pour faire perdre du temps aux gens trop faibles comme moi et qui ne savent pas dire non.

À la Librairie de France pour dédicacer des exemplaires du livre d'Isay. On est assez confiant là sur le succès de librairie.

Chez Ladis après dîner. Il me donne à lire un article de la Revue des Deux Mondes, d'un général français, résumant la doctrine italienne sur la guerre aérienne. Si guerre il y a, et guerre aérienne, la doctrine italienne me paraît fort supérieure à la nôtre, si tant est que notre état-major en ait une. En ce moment notre infériorité est certaine. Quelle misère, sortant à peine de cette tuerie dernière, de ne pas être débarrassé de la menace de son recommencement.

28 [mai 1932]

Journée presque entièrement stupide. À l'École et chez Julian. Bien. Là c'est la jeunesse. Puis à côté de l'Étoile pour voir le Phénix que la C[ompagnie] d'assurances veut reproduire sur le toit de son nouvel immeuble. Travail curieux de cuivre martelé, non repoussé. Le résultat est bon en somme. Il paraît que Baugnies (Jacques) et la famille font des difficultés pour accepter le travail. Pas fameuse cette statue. Travail hâtif, facile, sans caractère. J'espère avoir arrangé les choses.

Encore abandonné l'Institut pour travailler à la tête de ma France. Bien. Mais après, quelle séance pénible à la Fondation américaine. Jean Boucher était complètement ivre. Naturellement, comme les autres années, il ne nous a pas été possible de faire avoir les bourses à qui nous aurions voulu. Ce jugement, rendu hâtivement, sur la vue de collections de photos examinées en vitesse, pour un prix de cette importance, ne peut pas donner de bons résultats. Pas un des boursiers depuis sa fondation ne s'est révélé depuis, grand sculpteur. Je ne crois pas qu'il puisse en être autrement[38]. J'ai pu passer quelques instants chez André Blum et y ai trouvé encore Isay et Weiss.

À dîner, Jacques[39] me dit avoir eu une longue conversation avec le sénateur Bérenger à propos de la prochaine Exposition 1937. Il voudrait toujours en faire une exposition dépassant le cadre restreint d'Art décoratif, que ce soit une exposition bien plus étendue, de l'Humanité, alors voilà mon Temple qui devient de circonstance, prend son sens... Il faut s'y atteler. Bérenger a en quelque sorte promis à Jacques de lui donner un poste important dans l'administration de cette exposition.

29 [mai 1932]

Les funérailles très émouvantes d'Alphandéry.

Courte visite au Salon dit des Tuileries qui expose maintenant boulevard Raspail. Bien vilain bâtiment. Le hall de sculpture bien éclairé. Je voulais voir les bustes de Despiau dont Boucher l'autre jour disait qu'ils sont remarquables. L'un d'eux est bon, très bon. Toujours dans la même formule, par exemple. Celui de bronze est d'un dessin très vigoureux, osé, les plans franchement affirmés. Le buste doré moins bien, trop dans la formule. Aussi bien, tout autour voit-on quantité de bustes de valeur à peu près égale. Leur présentation leur donne à tous un air de famille dont on se lasse vite. Le meilleur buste de ce Salon est un buste de Jeanniot, un buste de femme excellent, poussé loin, dégagé de toute formule, beaucoup plus fort que Despiau. Despiau est incapable de pousser l'analyse d'une forme aussi loin. Jeanniot marque en ce moment un retour à la nature sympathique. Quant aux autres génies présents et futurs, groupés autour, ils se valent, les pauvres. Dejean montre un Torse de femme qui serait une bonne étude pour un jeune homme débutant. Le jeune Gimond est d'une insigne faiblesse. C'est sans avenir. En peinture c'est mieux. Les grands noms qui exposent là se montrent dignes de leur réputation. Besnard, Denis, Simon. C'est très bien. Lhote expose un Léda pornographique. Derrière le cygne placé entre les jambes de Léda il fait apparaître le Dieu qui relève une des cuisses de la jeune nymphe pour la posséder dans une position pompéienne. Ça n'a même pas l'excuse des deux femmes de Courbet, car c'est de la bien faible peinture, tandis que Courbet, quelle qualité! À ce Salon on voit la caricature, involontaire, des plus représentatifs du mauvais goût des artistes français. Je ne croyais pas qu'on peut avoir plus mauvais goût bourgeois qu'Etcheverry. Kisling y parvient. C'est incroyable. Aussi passons à autre chose.

Je relisais dans la nouvelle édition de Joubin, le journal de Delacroix, son voyage au Maroc et en Espagne. Il raconte une scène de courses de taureaux dont je suis étonné qu'il n'ait rien tiré. C'est la mort d'un toréador : pris dans le flanc par la corne, essayant de se dégager en s'appuyant sur le crâne du taureau qui l'emportait triomphalement autour de l'arène, de sorte qu'il s'enfonçait à chaque pas et trépassa sans qu'on ait pu le secourir. Il doit y avoir dans l'œuvre de Goya quelque dessin, peinture ou lithographie d'un drame de ce genre. Je me propose d'en faire un petit groupe.

30 [mai 1932]

Aujourd'hui, déjeuner à Reims, chez le marquis de Polignac, propriétaire et administrateur des caves Pommery. Uniquement pour ce déjeuner au champagne vint-cinq hommes, autour de la cinquantaine, tous ayant des situations importantes, ont perdu une entière journée. J'en étais. Il y avait R[ené] Piot, frais député; Puau, Breguet, le commandant  Bénédique, Robiquet, de Tarde, Bedel, Larroy, René Moulin, Marchandeau, Laugeron, préfet du Nord, doct[eu]r Lemée, comte Claugel, ambassadeur en Autriche, etc. J'oubliais Martin et Ulrich du métro. Courte visite en ville, mais durant laquelle nous fumes à quelques uns voir ou revoir la cathédrale et S[ain]t-Rémy. Les traces de la guerre s'y voient encore, se verront toujours. On frémit en pensant à ce que serait cette guerre nouvelle, les épouvantables doctrines actuelle de guerre intégrale. Peut-on imaginer la France, si on suppose la guerre entre elle et l'Italie, allant avec deux cents avions sur Florence... Bedel, dans le train, racontait une histoire singulière qui serait arrivée en Norvège, il y a une dizaine de jours. Un soir, tandis que le roi, dans son château à Oslo, recevait quelques amis intimes, on entendit tomber dans le parc un aérolithe. Sifflement, masse incandescente qui parut énorme. Le lendemain, recherches, fouilles et on finit par déterrer, enfouie assez profondément dans le sol, une véritable fusée d'obus, fusée immense ayant environ 1 m 50 de hauteur. Examinée par des savants elle fut constatée d'un métal nouveau, inconnu encore, résistant à des chaleurs considérables. On se perdait en conjectures sur l'origine de cet objet incontestablement fabriqué par des êtres vivants. Étant donné l'état fébrile d'imagination dans lequel se trouve l'humanité d'aujourd'hui, on en venait à supposer que cela pourrait venir d'une humanité habitant une autre planète, lorsque l'ambassadeur d'Allemagne demanda une audience au roi. Ayant appris la chute de l'objet dans les jardins royaux, il venait l'aviser en s'excusant qu'il s'agissait d'une expérience d'un canon nouveau pouvant tirer à des distances insoupçonnées. Ce canon, placé dans les forêts de Mazurie, s'était proposé d'envoyer un projectile dans l'île de Terre-Neuve, dans des forêts où des ingénieurs allemands étaient partis. On pensait, en cas d'insuccès, tomber dans l'océan. On était tombé à 1 000 k[ilomètres] en Norvège. Bedel disait que les journaux norvégiens, sont pleins de cet événement. Chez nous, on ne peut pas l'ignorer. Aucun journal ne l'a signalé. Pourquoi ce silence alors qu'on exagère si volontiers tant d'autres choses moins importantes. C'est la chose la plus intéressante que j'ai entendu aujourd'hui. J'ai déjeuné à côté de M. Martin, qui doit être un homme fort intelligent et solide. Il me disait encore que Coty ne pourrait plus durer. J'ai essayé de parler avec Piot. Est-ce la conséquence de la bataille électorale (fatigue), il m'a paru assez éteint et ne pas avoir sur les problèmes qu'il aura à résoudre des visions bien claires.

— M. Marchandeau souhaite la participation socialiste pour les compromettre avec nous.

Ce n'est pas là non plus avoir beaucoup d'envergure.

Lily ce soir me disait avoir vu M. et Mme B[ouisson]. Il paraît que Herriot a envisagé un moment de se présenter à la présidence de la Chambre, pour éviter de prendre le pouvoir. Il l'aurait laissé entendre à une délégation socialiste qui a protesté, déclarant que plus que jamais la présidence devait revenir à B[ouisson]. Alors Herriot se serait mis à genoux par terre, aurait frappé le sol de son front, soulevant ainsi en l'air son gros derrière, disant :

— C'est entendu, B[ouisson] sera président, B[ouisson] sera président, B[ouisson] sera président.

C'était une scène parfaitement ridicule. Renaudel était paraît-il parmi les trois députés socialistes venus parler de la situation à Herriot. Tout ça, ce sont de petits cancans, mais ils dénotent cependant ceci : c'est que ce parti radical-socialiste n'a pas compris la raison de sa victoire; c'est que le parti radical-socialiste n'apportera pas la solution d'envergure qu'on attend.

31 [mai 1932]

Toujours retouches à la grande France[40] (têtes des figures du bouclier — Tête de La France). Le moulage du pylône "la Seine"[41] est terminé. Il est installé. Taillens m'a dit :

— Ça, c'est la chose étudiée. Ça ne sent ni l'improvisation ni la hâte. Aussi est-ce pleinement satisfaisant. Je ne vois rien à reprocher.

Enfin, il m'a fait beaucoup de compliments.

Visite d'un colonel en retraite, ami du docteur Armaingaud, pour régler sur papier timbré, par devant notaire, la commande du Montaigne. Le docteur se sent très souffrant, si vieux. Nous nous mettons d'accord sur le dédit au cas où la Ville ne donnerait pas sa décision dans une limite de temps précise.

Visite d'Henry avec des vignerons de la Marne et leur député, pour le buste d'un bienfaiteur de la région. Commande que je n'accepte qu'à cause d'Henry.

Réception chez les Pontremoli. Je causais avec Hautecœur et Focillon. On parlait sculpture et Hautecœur vint à citer, à propos du Salon des Tuileries, les noms de quelques exposants parmi lesquels celui du petit Gimond, ce demi-jeune, si peu sculpteur, regrettant la faiblesse de ce qu'il exposait. Bien que je n'aime pas, en public, parler sévèrement des sculpteurs, je ne pus m'empêcher de regretter aussi de voir exposer d'aussi faibles études. Alors Focillon :

— Ce sont œuvres qu'on aime pour la saveur de leurs défauts.

Je n'ai pas voulu répondre. Mais toute l'incompétence de ces écrivains d'art se trouve dans cette phrase. Ils ne savent pas différencier un défaut de l'ignorance. On peut dire que Delacroix a des défauts; que Puvis a des défauts, que Rodin a des défauts. Ils sont inhérents à leur nature, contrepartie obligatoire de leurs immenses qualités. Mais ils sont en même temps de grands savants, maîtres absolus de leur technique. Ce n'est pas du tout le cas d'un pauvre petit impuissant comme ce petit G[imond]. Ce n'est qu'un ignorant, qui ne sait pas construire. Ses productions sont trop pleines de fautes pour qu'on puisse parler de ses défauts. Comme presque tous ceux de cette bande. Maillol ne vaut guère mieux. Curieuse époque où des réputations se font sur d'aussi pauvres productions.

 

[1]    . Au lieu de : "apportant", raturé.

[2]    . Suivi par : "d'une élection", raturé.

[3]    Sources de la Seine.

[4]    . Au lieu de : "sera bien plus nettement républicaine que la dern...", raturé.

[5]    . Précédé par : "nouveau", raturé.

[6]    . Suivi par : "Tout est là", raturé.

[7]    . Au lieu de : "électeurs", raturé.

[8]    Sources de la Seine.

[9]    Sources de la Seine.

[10]  . Au lieu de : "atterré", raturé.

[11]  . Au lieu de : "enterré", raturé.

[12]  . Au lieu de : "toiture", raturé.

[13]  . Au lieu de : "les idées qu'on leur apprend", raturé.

[14]  Amélie et Françoise Landowski.

[15]  Marcel et Jean-Max Landowski.

[16]  Sources de la Seine.

[17]  . Suivi par : "avoir montré là quelque", raturé.

[18]  . Suivi par : "le caractère", raturé.

[19]  . Suivi par : "à grande échelle", raturé.

[20]  Sources de la Seine.

[21]  . Au lieu de : "du bassin", raturé.

[22]  . Suivi par : "S'il est vrai, et cela semble prouvé, que tout geste, tout mouvement, tout acte déclanche des vibrations qui s'étendent à l'infini, il est doux de penser que des vibrations sympathiques doivent", raturé.

[23]  . Au lieu de : "concerts spirituels", raturé.

[24]  . Suivi par : "descendant", raturé.

[25]  . Au lieu de : "apporte", "emporte", raturé.

[26]  . Suivi par : "de même que des choses mortes sembl...", raturé.

[27]  Les Fantômes.

[28]  . Suivi par : "malgré une mauvaise nuit", raturé.

[29]  . Au lieu de : "central", raturé.

[30]  . Au lieu de : "de la mort", raturé.

[31]  Les Fantômes.

[32]  . Suivi par : "étonnante", raturé.

[33]  Les Fantômes.

[34]  Henriette.

[35]  Sources de la Seine.

[36]  . Précédé par : "Le président", raturé.

[37]  Les Fantômes.

[38]  . Suivi par : "Je suis parti", raturé.

[39]  Chabannes.

[40]  Les Fantômes.

[41]  Sources de la Seine.