Octobre-1953

1 octobre [1953]

Marthe de Fels, toujours amie fidèle, vient avec une vieille dame américaine. Celle-ci avait vu à Voisins mes deux groupes de la pièce d'eau[1]. Elle veut me demander quelque chose pour son jardin en Amérique. Mais elle aime "les petits faunes". Elle les adore, genre XVIII°. Elle en veut un, très petit, pas plus grand que ça (geste des mains) qui indiquera de la main, la route pour aller jusqu'à un étang. C'est une vieille dame, qui a plus de quatre-vingts ans, femme d'un ancien ambassadeur d'Amérique en France. Elle dessinait dans sa jeunesse. Mais pour l'amour du futur ambassadeur, elle a abandonné le dessin. Et maintenant elle adore les petits faunes. Pas de chance avec les clients que la gentille Marthe me présente. L'une, Mme Warner, veut son portrait cubiste ultra "moderne", l'autre veut du XVIII!

2 oct[obre 1953]

Déjeuner chez Susse, le fondeur. À Garches, non loin de Bosworth. Jolie maison. Jolie vue. Jolie femme, madame Susse. Comme tous ces gros entrepreneurs, mi-industriels, mi-artisans d'art, consultés par les administrations pour de nombreux travaux, il est un peu comme Rudier était, au courant de bien des choses. Il me confirme que Braque a été payé exactement treize millions pour son scandaleux plafond. Quant aux sculptures cubistes dont je vois chez lui les productions banales, car c'est devenu banal :

— Tout ça, me dit-il, est presque uniquement acheté par les conservateurs de musée.

Ce sont les États qui payent.

Qu'il y aurait d'intéressants articles à faire sur ce qui se passe dans les B[eau]x-Arts. Tout ce qui se trame derrière le paravent du modernisme. Mais il faudrait du temps et de l'argent pour se documenter.

Téléphone avec André Duffet, de Neuf Marché. L'inauguration[2] est remise après le 25 oct[obre]. Ni André Marie, ni Éd[ouard] Herriot qui veut venir, ne sont libres le 25. C'est un soulagement.

Fini la lecture de Dostoïevski Souvenirs de la maison des morts. La simplicité avec laquelle c'est écrit, l'objectivité du récit, presque le manque d'indignation, la résignation des condamnés, la presque bonhomie avec laquelle ils sont traités, font qu'il reste de cet ouvrage l'impression d'un engourdissement lent qui endort peu à peu ces criminels, car il ne semble pas qu'il y ait, sauf les politiques, parmi ces condamnés, le moindre innocent. À côté de ce qui s'est passé dans les camps de concentration et d'israélites où tous étaient innocents, ces camps de Sibérie à la fin du siècle dernier, paraissent presque anodins. Mais je me souviens des récits de l'oncle Paul. C'était des autres forçats que venaient le danger.

4 oct[obre 1953]

Nous faisons à Émile Mâle, dans son musée de Chaalis, une visite depuis longtemps promise.

En arrivant nous apercevons sa tête blanche, sa silhouette toute amenuisée, effondré sur un canapé, à côté d'une radio marchant plein gaz. Il est tout seul. Il nous aperçoit, vient à nous sur ses jambes un peu pliées et nous reçoit avec sa courtoisie d'un autre temps, sa façon de terminer ses phrases en étalant les derniers mots. Mais comme il est devenu pas mal sourd, il n'a pas arrêté la radio tonitruante sur laquelle Madame Mâle se précipite et qu'elle arrête. Tandis que nous la saluons, il remet la radio en marche. Elle l'arrête de nouveau. Elle l'arrête encore et le fait asseoir un peu plus loin. Son fils, le docteur, arrive, accompagné de deux dames, deux jeunes filles. Congratulations. Et voilà de nouveau la radio en marche. Tristesse d'assister à l'amoindrissement d'un homme de telle valeur, qui ne semble plus guère préoccupé que de faire marcher la radio qu'il entend mal, et qui sournoisement s'approche du bouton convoité, que sa femme aussitôt arrête, cachant à peine son agacement. Philémon et Beaucis, vieux symboles ne vous disputiez-vous jamais? Déjeuner bien sympathique. Les deux dames qui accompagnaient le Dr Mâle reviennent d'Amérique. On en parle, bien entendu. La vie trépidante des hommes qui vivent dans une perpétuelle angoisse. Les affaires. Les risques. C'est le pays des angines de poitrine, des maladies de cœur, des congestions cérébrales.

Marcel[3] vient nous voir le soir, nous parle d'un livret nouveau auquel il pense, Le ventriloque. L'homme se dédoublant devant un autre lorsqu'il fait parler ses poupées. Il finit par ne plus savoir à quel moment il est lui-même. Il y a un thème. Mais il faut trouver une trame autour de laquelle faire agir ses marionnettes. Ce serait un peu pirandellien? Non, parce que ce seront les marionnettes qui mèneront le jeu. Difficile.

7 oct[obre 1953]

L'imposte de la Porte[4] est ajustée dans le cadre. Ainsi couchée, j'ai peur que le cadre ne fasse trop profond, que la sculpture semble dans une boite.

Winder [ ?], à l'Institut, m'apprend que sa fille mariée et son gendre ont eu un grave accident d'auto. Ils sont été très secoués mais on ne croit pas que pour aucun des deux il y aura une suite grave.

 

Cahier n°57

8 octobre 1953

Fête de Ladis[5]. L'atmosphère de cet anniversaire est bien changée. Contraint.

Très bonne impression, à la fonderie, de l'imposte[6]. Une patine vieil or serait ce qui ferait le mieux. Trop chère!

À l'atelier, installation des modèles en plâtre dans le cadre.

Fatigue. Comme si je préparais une grippe.

C'est demain la réunion de la commission nationale des monuments commémoratifs[7]. Quel titre! Et quand on pense quels sots en font partie. Sots n'est peut-être pas le mot juste. Car ces Cassou, R[obert] Rey ne sont pas des sots. Peut-être même sont-ils jusqu'à un certain point sincères.

9 octobre [1953]

Porté ce matin (Goujon) la maquette du Trocadéro[8] au ministère de l'Intérieur. Dans la salle des fêtes, grande salle toute délabrée, lamentable impression. Elle donne sur un jardin sur lequel doit donner l'appartement du ministre. Éclairage très mauvais. Venant d'en dessous. Exactement le contraire de ce qu'il faudrait.

Après-midi, travaillé à l'épée de Gregh.

Et maintenant, soir, sans nouvelles de ce qu'il est passé à la fameuse commission, je suis assez énervé. Avoir toute l'œuvre que j'ai derrière moi et être jugée par un sculpteur comme ce petit Couturier…

10 oct[obre 1953]

Ce matin, de bonne heure, toujours sans nouvelles. Je téléphone à Goutal, pas comme si c'était moi, mais de la part du président de comité.

— Rassurez-le pleinement, répond Goutal, le projet a été adopté par la commission.

Plus tard, j'ai reçu un mot de Niclausse me confirmant cette heureuse nouvelle. Grande satisfaction évidemment.

La dernière victoire à remporter pour le projet, va être d'obtenir à présent, les trois années nécessaires pour un monument de cette importance.

À la fonderie pour la patine de la Porte[9]. Ça ne va pas. Leur patineur est peu intelligent. C'est un vieux petit italien entêté, malheureusement habitué aux patines commerciales de cette maison. La patine verte va être très difficile à obtenir. Une grosse gêne provient de l'encadrement qui est en laiton. En outre, ils se servent trop de poudres de couleurs et de vernis mêlés à du bronze. Les bonnes patines doivent se faire avec des acides, des oxydes et à chaud. Le chalumeau ne peut pas servir dans ce cas à cause des écrins en fer qui fixent les panneaux sur l'armature en fer.

Après-midi, nous allons à Neuf-Marché pour tout déterminer pour le monument. Heuillard. Réunion avec une bande de braves types, le maire, André Duffet le président, les fils Heuillard et l'architecte Rimbert qui a réussi une heureuse combinaison.

11 oct[obre 1953]

Journée au lit. Lecture de Shakespeare retrouvé de Madame Longworth-Chambrun[10]. Livre remarquable. Après je vais relire tout le théâtre. Quand je pense qu'à 24 ans j'ai déjà tout lu de Shakespeare et que j'avais presque tout oublié, sauf les grands drames essentiels. Je vais essayer de mener Shakespeare en même temps que le monument de l'Armée[11]. Je l'ai fait masser dans sa taille définitive. C'est mieux que les agrandissements mécaniques. C'est l'erreur de Rodin de s'être trop servi de ce système d'agrand[issement] mécanique.

12 oct[obre 1953]

Avec Madeline à la fonderie pour la patine. Avec raison il voudrait du vert comme dominante. Mais le vieux petit patineur a déjà barbouillé le bronze. C'est chocolat. Affreux en ce moment. J'ai l'impression que c'est sur l'ordre du chef de la fonderie que cette hâte a été mise pour ce barbouillage.

13 oct[obre 1953]

Chez Susse. Susse a eu un mot qui me laisse à penser que ma Porte[12] n'a pas été fondue en bronze, mais en laiton.

— J'ai fait fondre dans le même métal que l'encadrement, pour pouvoir unifier la patine.

Trop tard pour rien dire en ce moment. Il faut d'abord finir. Au moment du règlement, je rappellerai ce mot. Ce qui pourra m'empêcher d'être trop volé.

Porté chez Barbedienne le socle pour le buste Darré. Revu le buste de G. Heuillard, qui fait bien.

À l'Institut, commission administrative centrale. On nous lit une incroyablement comique lettre du ministre de l'Éd[ucation] nat[ionale]. Pour revaloriser les palmes académiques, il est suggéré que lesdites palmes soient accordées à tous les membres de l'Institut qui ne les ont pas "pour que cette distinction soit pour les intellectuels ce qu'est la médaille militaire pour nos soldats…" Enorme! dirait Flaubert. La vie, quelle belle comédie.

Vu, en passant, un film très beau, américain Le grand chapiteau[13] avec des trapézistes étourdissants. Une femme splendide.

Rendez-vous chez Cornu, à propos du décret pris par l'Italie pour le classement de la villa Médicis comme monument historique. Il y avait Boschot, Pontremoli, Grange et moi. Et puis Jaujard qui me félicite de la décision de la Commission des monuments commémoratifs. Naturellement Cornu, plus épanoui que jamais, dit qu'il va faire le nécessaire. Pendant notre rendez-vous, conversation téléphonique avec je ne sais qui. C'était à propos de la grève du personnel des théâtres.

— Je serai un roc, vous entendez, un roc.

Incidemment, revenant à notre affaire romaine, il nous dit que la situation Fouque-Duparc est ébranlée. Pas seulement à cause du chantage de l'aventure féminine. Pour attitude générale trop molle, parait-il. Dommage. Peu d'hommes aussi sympathiques.

14 oct[obre 1953]

Chez Susse, où je vais chaque jour pour cette sacrée patine. Je n'ai jamais vu badigeonner des bronzes comme je le vois faire dans cette maison.

Téléph[one] un peu incompréhensible de Madeline. Il voudrait que le vert de ma Porte s'accorde avec celui des barreaux en fer de protection de ses fenêtres. C'est un vert bouteille tout venant, comme celui dont on peint les portes de jardin, et même de prison.

Après l'Institut, avec Gaumont et Winders retour à la fonderie. Leur impression est bonne, même très bonne. Mais on ne peut pas se débarrasser du fond marron. Notamment le motif des chevaux du soleil.

La situation internationale est, à mon sens, très aggravée. Et ce, depuis que les Russes ont en main la bombe atomique. Eisenhower ne cache pas son anxiété. Ah! Les bons idiots qui croyaient que la mort de Staline changerait quelque chose!

15 oct[obre 1953]

Très heureuse modification au socle du monument Troca[déro][14]. J'ai diminué la saillie. Le groupe en a aussitôt pris plus d'élan. Loi des contrastes. Le glacis du haut sera plus petit que celui du mur. Ce n'est pas très classique. Mais c'est le groupe qui compte.

16 octobre [1953]

Deux fois à la fonderie. Avec ce badigeonnage au barèges[15] on ne peut se débarrasser du ton chocolat. Impossible.

À l'Institut Pasteur pour voir l'effet du buste Darré. L'éclairage est déplorable. Le socle est un peu trop haut. Pas fameux, tout ça.

À ma seconde visite à la fonderie, j'ai trouvé la grosse Chana Orlof, devant la Porte[16], parlant avec Susse. Elle me dit :

— Je n'en disais pas de mal, au contraire. C'est très bien.

Les hommes de Brandt étaient là, examinant la serrurerie. L'un d'eux me dit :

— On va en parler dans Paris, de cette Porte.

La patine est mieux ce soir.

Cherché Lily chez Harlette[17].

Fatigue. Et puis les difficultés d'argent empoisonnent tout. Mon pauvre Marcel[18] a un mal énorme.

17 oct[obre 1953]

Avec Shakespeare, ce grand Baar fait mon affaire. Il a un caractère. Je fais plus un Prospéro que Shakespeare proprement dit. Les portraits contemporains, s'ils sont vraiment contemporains, sont extrêmement fades. C'est un auteur dramatique. Certes! C'est aussi un acteur, ce qui me donne le droit de prendre des libertés avec son visage. Et puis cette gueule de Baar répond à la vision que j'aie eue de Shakespeare un jour où je descendais le petit chemin des pins qui va des Lauves[19] au port, au Brusc.

18 oct[obre 1953]

Visite de Janniot. Son impression me semble très bonne. Conversation d'ordre général. Me parle de la paresse des jeunes. Ils n'arrivent à l'atelier pas avant 9 h ½ ou 10 h. Ils ne travaillent guère plus de deux heures et demie par matinée! Untersteller bourre les postes libres de l'École des membres permanents du Salon des Tuileries (Goerg, Brianchon, Belmondo, etc.). Il veut arriver à se faire inviter à ce Salon. Ceux-ci s'en gardent bien jusqu'à présent. Tout ça n'est que mesquinerie. En outre l'École est envahie par les ateliers libres d'architecture. On crée ainsi de dangereux précédents. Pourquoi pas les ateliers libres de peinture et de sculpture (Julian, académies diverses, etc.). La conséquence de cette démagogie est la destruction des collections de l'École, la destruction des belles salles hautes qui étayent la Melpomène[20]. Dans tout ce tohu-bohu de chantier a-t-on prévu des emplacements décents pour les collections?

Le mariage à Rome. Janniot, comme moi, y est hostile. C'est la tenue de la Villa, les histoires qui courent Rome sur les faux ménages qui se font passer pour vrais, qui sont en partie cause du récent décret du gouvernement italien, construction de la nursery (le ridicule ne tue plus), la construction dans le jardin d'une douzaine de garages.

La conversation tombe sur Despiau, son aventure avec une jeune cousine de Mont-de-Marsan qu'il fit venir à Paris, qu'il traînait avec lui boulevard Montparnasse. Elle disait de Despiau :

— Il me fait poser. Il me b… quand il peut. Et croyez-vous qu'il ne me paye pas même une robe, ce radin.

Pénible histoire. Il visait trop à poser pour l'homme puissant. L'imitation de Rodin était sa hantise. Il ne pouvait y atteindre en rien. Et ma foi, sa petite sensation, comme disait Cézanne, avait assez de personnalité pour qu'il reste lui-même.

 

À Fernand Gregh.

 

Chaque soir je prends un livre,

Mais sur ses pages, je m'endors…

Cette nuit, je suis comme ivre

C'est que je lis L'Âge d'or

 

C'est que l'Âge d'or délivre

Des brumes, le passé mort

Ses fantômes font revivre

Nos étonnements d'alors

 

Sur ton limpide chemin

De parallèles destins

Te furent plus que toi-même.

 

Mieux que nous tu les compris

Avec ton cœur tu le dis.

C'est pour cela que l'on t'aime.

 

19 oct[obre 1953]

Impossible de vaincre l'entêtement de ce sot petit patineur à la fonderie qui s'acharne à cerner les groupes par des sortes de fonds sombres chocolatés.

Puis à l'Institut Pasteur. C'était l'inauguration du pavillon Darré. Vallery-Radot me fait des compliments du buste. Il fait quand même peu d'effet. J'entends quelqu'un dire :

— Je ne vois pas pourquoi on fait tant d'histoire autour de Darré. Il y en a beaucoup ici qui méritent autant que lui.

On est curieux, même dans la mort. Jeannette, devant le buste, me dit :

— Il n'a jamais eu l'air, dans sa vie, aussi génial.

Après-midi, encore à la fonderie.

Soir chez Ladis[21], qui est au lit où il continue à faire des vers de mirliton sur des idées de philosophie… Quelle singulière manière de vouloir toujours faire la leçon aux gens, même en vers de mirliton. Et de se poser en désabusé lui qui a eu une vie de travail certes, mais sans aucune difficulté, sans presque aucun chagrin, jusqu'à la mort de Lily[22], c['est]-à-d[ire] cinquante ans de vie. Les deux guerres ne l'ont touché en rien, de manière directe. Drôle de révélation. Et il a été si étonnant pendant la première partie de sa vie.

20 oct[obre 1953]

Re-re-refonderie. Je ne suis pas satisfait encore, des fautes ont été faites au départ. On ne pourra pas les réparer. Le personnel est en arrière de la main.

Travaillé bien à l'épée Gregh. Bonne composition, pas très originale. Mais réuniront-ils les fonds nécessaires?

Visite docteur Gardinier et Jacques Meyer. La grosse affaire maintenant va être la question du temps.

— Les camarades, me dit Jacques Meyer, trouvent que voilà bien longtemps que tout ça traîne.

— Pas de ma faute, en tout cas. Voici près de deux ans que je travaille gracieusement et nous voilà cependant à ce point de vue assez avancés.

— Justement, me répond-il, il faudra absolument finir dans deux ans. Le monument ne peut pas être inauguré un autre jour que le 11 novembre.

Impossible, deux ans.

21 oct[obre 1953]

Encore à la fonderie. La patine est finie. Pas fameuse. Madeline, que j'ai amené, reconnaît l'insuffisance de l'encadrement. Il aurait fallu là une richesse décorative discrète. Ou en tout cas, par des motifs géométriques envahir ce plan large et lisse. Mais ce que j'aurais préféré, c’aurait été un entourage fait de plantes médicinales, pour que ce ne soit pas un même motif se répétant.

Institut. Boschot n'a encore rien fait pour les invitations au secrétariat général des Beaux-Arts.

Après la séance, j'emmène Paul Léon à la fonderie. Malgré la patine insuffisante, commerciale et vulgaire, son impression est excellente. En bavardant, en le reconduisant, il me dit que R[aymond] Isay est directeur des Loisirs. Comme tel, évidemment, il n'a rien à faire. Il n'a pas de bureau. Son seul effort est de toucher 150 000 F par mois.

22 oct[obre 1953]

L'Assemblée au Viêt-Nam vient de voter un ordre du jour hostile à l'Union française. Il me semble que la France devrait sauter sur cette occasion pour laisser le Viêt-Nam se débrouiller et retirer ses troupes de ce guêpier. Mais je ne connais pas la question à fond, bien sûr!

23 oct[obre 1953]

Nous décidons de faire des invitations pour le 29 oct[obre] et d'inviter un certain nombre de critiques à venir à l'atelier voir le plâtre de la Porte[23]. Paul Léon le conseille à Lily[24]. Il nous a remis l'annuaire des critiques d'art. J'ai compté leur nombre. Ils sont plus de mille!

24 octobre [1953]

Passé à la Faculté. La Porte[25] n'était pas arrivée. On travaillait à la préparation des emplacements pour dormants (armature de fer sur laquelle tourneront les battants de la porte).

26 oct[obre] 1953

Séance annuelle des cinq Académies. Petit déjeuner intime à l'ambassade de Belgique, présidé par Van Zeeland. Il y avait Winders, Lemaresquier, Domergue et moi. Nous étions tous dans nos académiques costumes. Van Zeeland excessivement brillant. Il est à fond Européen. Je crois qu'il a raison.

Séance habituelle, bourrée de monde et de cinq discours dont un seul, celui de André-Marcel, fut fort bien. Idées et forme.

Nous passons à la Faculté[26]. Le fronton est posé! Bonne impression.

27 oct[obre 1953]

Pose des ventaux. Magnifique manœuvre. Impression bonne. Je crois que cette Porte "portera"…!

28 oct[obre 1953]

Avant la séance, je passe rue des S[ain]ts-Pères. Je crois que ça va. Seul l'encadrement m'ennuie. Il fait un peu comme ces encadrements à la mode pour les tableaux modernes qu'on appelle des "Marie-Louise".

Séance. Hautecœur nous lit la notice qu'il doit lire mercredi prochain à la séance solennelle de l'Académie des beaux-arts. Très bien fait. Mais pas vivant.

Après la séance, avec Dupas, Souverbie, Winders, nous allons rue des S[ain]ts-Pères[27]. Beaucoup de compliments qui semblent très sincères. Surtout de Gaumont qui [est] venu m'en parler à la séance.

29 oct[obre 1953]

Cette fameuse réception à l'atelier pour montrer le plâtre de la Porte[28]. Sont venus Souverbie, Maximilien Gautier, Kuntzler accompagné d'une Mme Colon, un rédacteur à Arts et je ne me rappelle plus qui. Mais peu se sont dérangés. Amis nombreux. Impression bonne, vraiment. Paul Léon, Huisman et sa femme.

Fin de journée. Téléphone un peu excessif de Madeline à cause de la patine. Des types ont dû lui critiquer cette patine. Je ne puis m'empêcher de lui écrire une lettre plutôt désagréable. L'erreur est surtout d'avoir fait l'encadrement d'une matière différente, laiton laminé tandis que la partie sculpture est de bronze fondu. Les patines sont différentes, ce qui enlève de l'unité.

30 oct[obre 1953]

D'après photos, travaillé à la médaille Van Zeeland. Cette médaille, idée absurde de Lemaresquier.

31 octobre [1953]

Grosse amélioration à Shakespeare. L'esquisse est bonne, mais froide. L'amélioration consiste à le mettre dans la tempête. C'est de plus en plus Prospéro. Assis sur le roc, tandis que les flots déferlent à ses pieds. Son manteau est tendu par le vent. Lui, reste droit, immobile, comme un roc lui-même. C'est un roc sur un roc. Fait le croquis, riche de possibilités. Sortant des flots, enfin Ariel et Caliban peuvent apparaître, normalement… Étant dans la fantasmagorie, ce surgissement devient normal. Dans la version calme, ces personnages n'avaient guère de sens.

 

[1] Le Concert champêtre et La Becquée.

[2] Du monument Heuillard.

[3] Marcel Landowski.

[4] Nouvelle Faculté de médecine.

[5] Ladislas Landowski.

[6] Nouvelle Faculté de médecine.

[7] Pour le monument A la Gloire des armées françaises.

[8] A la Gloire des armées françaises.

[9] Nouvelle Faculté de médecine.

[10] Clara Longworth de Chambrun, Shakespeare retrouvé, Larousse, Plon, 1947.

[11] A la Gloire des armées françaises.

[12] Nouvelle Faculté de médecine.

[13] Sous le plus grand chapiteau du monde, de Cecil B. DeMille.

[14] A la Gloire des armées françaises.

[15] Le barèges (ou sels de barèges plus précisement) est l'ancienne appellation du polysulfure de potassium.

[16] Nouvelle Faculté de médecine.

[17] Amélie Landowski et Harlette Gregh.

[18] Marcel Landowski.

[19] Propriété de P.L. au Brusc.

[20] Salle de l’Ecole.

[21] Ladislas Landowski.

[22] Amélie Lowenstein-Landowski.

[23] Nouvelle Faculté de médecine.

[24] Amélie Landowski.

[25] Nouvelle Faculté de médecine.

[26] Nouvelle Faculté de médecine.

[27] Nouvelle Faculté de médecine.

[28] Nouvelle Faculté de médecine.