Cahier n°21
3 fev[rier 1926]
Travail toujours multiple. Monument de Fargniers, maquette Alger, S[ain]te Geneviève, Paul Adam, etc.
Hier soir, ouverture du cours sur Victor Hugo, à la Sorbonne. Très remarquable conférence de F[ernand] Gregh.
5 [février 1926]
MM. Guidetti, Deval, Lang venus voir le modèle de S[ain]te Geneviève.
8 [février 1926]
Au comité des A[rtistes] f[rançais], on nous lit une lettre du ministre demandant aux Sociétés de s'entendre pour un Salon unique. Les artistes sont trop nombreux. Je ne crois pas qu'une telle solution [à] la dispute pour le Grand Palais [soit] possible[1].
10 [février 1926]
Quand le Dr Richet ne dort pas, il me récite des vers de lui, dont certains sont intéressants. C'est un homme remarquable.
11 [février 1926]
Aujourd'hui, entente avec MM. Javal et Bourdau [Bourdeaux]pour cette illustration de Dante. Je ne m'engage pas pour une date. Je voudrais bien réaliser cela. Mais en trouverai-je jamais le temps?
13 [février 1926]
Ma maquette d'Alger s'arrange.
16 [février 1926]
L'ami Bellaigue me dit son étonnement de voir Mme de S[ain]t-Marceaux vouloir, pour le monument de Fauré, faire servir l'ancien groupe de son mari [2] appelé je crois, Les Chimères. Mme de S[ain]t-Marceaux était venue me dire qu'elle s'opposait à ce que le monument me soit confié (elle fait partie du comité), et qu'elle proposerait ce groupe! J'ai trouvé cela assez énorme et ne lui ai rien répondu, si ce n'est que je ne ferai pour ma part rien contre elle et m'inclinerai devant la décision du comité.
17 [février 1926]
On me demande de faire une conférence sur la technique de la sculpture. Aurai-je seulement le temps de la préparer?
19 [février 1926]
M. Honnorat et Paul Reynaud sont venus voir Berwick. En tout cas ils ne pourront pas me reprocher de ne pas m'être conduit chiquement dans cette histoire. Et vraiment cela ne valait pas la peine de faire toute cette affaire. Tout est bien qui finit bien.
Téléphone de Mme de S[ain]t-M[arceaux] qui me demande de collaborer au mon[umen]t Fauré! Je ferais une médaille sous le fameux groupe. Je réponds que j'attends la décision du comité.
Puis téléphone de Bellaigue, puis de Rabaud qui semblent furieux du manque de tact de M[me] de S[ain]t-M[arceaux].
20 [février 1926]
Pour la fondation américaine, j'ai été visiter aujourd'hui un nommé Paul Cornet, sur lequel les critiques d'avant-garde font des articles dithyrambiques. Il a 33 ans. À cet âge j'avais fait mes Fils de Caïn, l'Hymne à l'aurore, Édouard VII, etc., et le monument de Genève était gagné. On ne peut imaginer la nullité de la sculpture de ce garçon. On croirait des joujoux. Et puis presque rien. Aucune production. Même pas la plus petite imagination. Quelle drôle d'époque!
Le comité du mon[umen]t Fauré a décidé de me confier le monument.
21 [février 1926]
Chez Albert Besnard, Mme Breslau nous raconte des histoires sur cette Marie Bashkirtseff, son toupet, comment elle écrivit à Carolus-Duran pour lui demander de faire le portrait de son pied. Le lendemain C[arolus]-Duran était chez elle, fort alléché.
22 [février 1926]
Devant le restaurant d'Orsay rencontré M. Cruppi. Je ferai toujours comme si je n'étais pas fâché contre lui. Il faut le différencier, malgré tout, de cette aventurière qui a mis le grappin sur lui.
Cette conférence me donne du travail. C'est un peu absurde d'accepter ce surcroît de besogne, avec tout ce que j'ai à faire.
25 [février 1926]
Lettre de Mme Blumenthal. C'est un peu le système américain : "Je marche si un tel marche (en l'espèce Rockefeller). Rockefeller n'ayant pas marché, je ne marche plus." Voilà comment après avoir donné beaucoup d'espoir, on ne suit pas. Tant pis. Je lui reste reconnaissant de son intention d'un jour. Ç'aurait été trop beau.
Gentil mot de Mme de S[ain]t-Marceaux qui me félicite de la décision du comité Fauré. Très gentille lettre même.
[1] . Dans le manuscrit : "Je ne crois pas qu'une telle solution de la dispute pour le Grand Palais est possible."
[2] . René de Saint-Marceaux.